L'édito de Grace Gatibaru
Le pain nourrit, fait plaisir, crée du
lien social, culturel et spirituel. Il y a
de quoi lui en être reconnaissant !
Au Foyer de Grenelle, merci est le
premier mot qui vient à la bouche au
début d’un repas et le dernier que l’on
prononce en quittant la table.
Jésus prenait le pain, rendait grâces à
Dieu, qui le fait « sortir » de la terre,
avant de le rompre, de le donner à
la foule affamée qui le suivait et à
ses disciples pour l’institution de la
Sainte-Cène.
En amont, comme en aval, beaucoup
de mains se sont « mises à cette
pâte-là », afin qu’il y ait au Foyer, du
bon pain à partager dans un
cérémonial immuable : de la semaison
du grain, à la moisson et à la
préparation de la farine, à l’activité
bénévole de celles et ceux qui le
glanent et le distribuent. Pour chaque
main, nous sommes reconnaissant.e.s.
L’Observatoire du pain dit qu’une
véritable histoire d’amour existe entre
les Français et le pain. Il rappelle que
l’étymologique du mot « copain » est :
celui avec qui on partage le pain. Un
étranger qui arrive en France est tout
de suite interpellé par ce lien culturel
que nous avons avec lui. Que ferionsnous sans notre petite baguette
quotidienne, qui s’échange de la main
du boulanger à celle du client ?
Ce pain que l’on porte comme un bâton avec
un rien de désinvolture, et dont on
rompt un morceau croustillant avec
gourmandise ?
Au Foyer, il y a toute une ambiance
autour du pain pour faire chanter le
cœur reconnaissant. Le matin, la
tartine chaude annonce une journée
qui commence bien et, le mercredi, le
pain a une place centrale au dîner,
comme au grand souper de Noël. Il dit
la considération pour l’autre, car on
sait, avec lui et les mets qu’il
accompagne, qu’on sera bien accueilli,
dans ce cadre arboré et fleuri. Il y a
toujours une place à table (à réserver
toutefois à l’avance pour le dîner). On
pose son sac, on se repose parce que le
service est à table. On se sent
humain.e car accueilli.e. Bénévoles,
salarié.e.s, convives échangent avec
confiance.
En ce temps de crise et d’insécurité
alimentaire, toutes et tous mangent à
leur faim au Foyer et il y a toujours du
surplus. Les accueilli.e.s peuvent
trouver là des portes qui ouvrent sur
d’autres soutiens, matériel, amical ou
spirituel, leur laissant espérer un jour
meilleur. On quitte la table avec un peu
plus de force pour affronter la vie.
Surtout, toutes et tous ne cessent de
se découvrir et de s’enrichir
mutuellement.
Certain.e.s convives reviennent même,
rien que pour le plaisir, pendant 5, 10,
voire 15 ans…
Merci pour le pain et pour l’amitié.